étape 4 : Au delà de la mort, la légende continue...

Ce combat durait-il depuis une heure, un mois, une décennie? Klinty n'aurait su le dire... Encore et encore une horde d'ennemis sans visages s'avançait et chargeait les nombreux guerriers accompagnant le tavernier. Une ou deux fois il crût reconnaître un grand oncle, ou un cousin, mais le flot de la bataille l'empêchait à chaque fois de vérifier. Les coups de haches pleuvaient, pourquoi? Aucune importance, l'ennemi était là et il fallait l'abattre, ceci avait un but, les mouvements se faisaient plus fluides, plus efficaces et pour une raison échappant à son esprit le barbare ne recherchait plus que la perfection dans l'art du combat, avancer sur la Voie du Guerrier et aller le plus loin possible avant la Fin.

Cette étrange et froide femme qui l'avait amené ici, une fois encore Klinty se rappela son visage, dur, sans sourire et des yeux noirs comme des puits sans fond. Chacun de ses gestes était mesuré, précis, et aucun n'était inutile. Elle était impressionnante, sa puissance guerrière transparaissant dans chacun de ses pas, elle l'avait amené jusqu'à ce champ de bataille et avant de partir elle murmura : "Tu ne devrais pas être ici, Fils de Cröm, ni aucun de tes frères..."

Combien étaient-ils, les Fils de Cröm, dans ce champ de désolation que nul rayon de soleil n'atteignait, laissant le métal des haches terne et sans reflet... Klinty trouva la réponse à cette question, grâce à Cröm? Grâce au hasard? Où fallait-il y voir l'esprit combatif des barbares? Toujours est-il que subitement tous les Fils de Cröm tombés dans le Donjon Story se retrouvèrent, et le Valhöll connut ses premières minutes de tranquillité depuis une éternité, les Barbares Agnostiques Mercenaires se tenaient sur une montagne de cadavres et tout autour une horde de guerriers les regardaient avec respect. Alors, la nuit tomba et de gigantesques portes apparurent et la multitude de guerriers se dirigèrent vers elle, derrière ces portes une infinité de mets et d'hydromel les attendaient, puis quand le jour reviendrait, tous repasseraient les portes et combattraient jusqu'à la prochaine nuit. Les Fils de Cröm, eux, ne passèrent pas les portes, d'un commun accord ils décidèrent de partir du Valhöll et de rejoindre la terre des vivants car il leur restait une mission à accomplir, la seule tâche dans leur Histoire.. Il fallait qu'ils La vainquent.

Après que le vieil homme aie quitté le Piêmni-Garou en s'enfonçant dans le béton, ce dernier s'approcha de la vague figée, suivi par le tigre à dent de sabre, qui continuait de ronronner et de se frotter à ses jambes. En arrivant devant le béton, il avança sa main vers la surface et l'effleura pour se rendre compte qu'elle n'était pas solide, mais gélatineuse, visqueuse… Sa main s'enfonça doucement dans la paroi, pénétrant sans grande difficulté. Il la retira vivement, surpris du phénomène, puis recommença.
Après tout, si le vieux croulant est entré, pourquoi pas moi ? Et puis, il dit qu'il peut nous faire survivre… songea-t-il. Aussitôt, il inspira un grand coup et franchit la barrière de béton, comme on entre dans une piscine de shampooing.



[HJdR]Oui, tous les jours, je vais à la piscine de mon quartier, qui est remplie de shampooing.[/HJdR]

En pénétrant dans le béton, le Piêmni-Garou eut un réflexe naturel, instinctif, de fermer les yeux et retenir sa respiration. Toutefois, avec un effort considérable, aidé par une légère brise qui soufflait, il parvint à ouvrir les yeux et se retrouva au milieu d'une vaste salle éclairée de torche de laquelle partait un couloir. Faisant rapidement volteface, il vit derrière lui une sorte de porte ouvrant sur la prairie artificielle qu'il venait de quitter : le tigre à dent de sabre regardait d'un air perplexe dans sa direction.
Il doit se demander ce qu'il se passe…
Le vieillard se retourna et regarda en direction du couloir : en le scrutant bien, il se rendit compte qu'il amenait à une autre salle, moins éclairée, de laquelle venait la brise qu'il sentait. S'armant de son courage, le Piêmni-Garou s'engagea dans le corridor et parcourut les quelques dizaines de mètres qui le séparait de l'autre pièce. En arrivant, il fut accueilli par la voix de l'homme qu'il avait vu tout à l'heure.
« Ah, tu es là, toi ? fit-il sans se retourner, penché sur ce qui semblait être une vasque de télévision. Tu ne pouvais pas rester à ta place, à attendre que je ramène tes frères ? Tu vas trainer dans mes pattes, maintenant ! Déjà que ces… aaah ! Cröm, viens-moi en aide ! Ils ont sottement décidé de revenir à la vie en passant par les souterrains ! C'est un dédale monstrueux, on y sera encore dans cent ans, peut-être.
– Quels souterrains ? Où sont…
– Quels souterrains ? Quels souterrains ? Mais ceux où nous nous trouvons, voyons ! Alors qu'il eut été si facile pour eux de rester sur place à m'attendre… Maintenant il va falloir aller les chercher. Bon, tu pourras m'être utile, surveille la vasque pendant que je consulte les plans de ces souterrains. »

Le vieil homme qu'encombrait le Piêmni-Garou consultait ses plans et marmonnait quelques paroles dans sa barbe, quand le Evuncilgien se décida à lui poser la question qui le turlupinait. « Non, mais sincèrement, homme… tu ne peux pas me donner quelques explications quant à ce que tu fais ? Et comment marche toute cette science ? »
L'inconnu regarda longuement son interlocuteur puis soupira et se résigna à lui répondre. « Tu l'auras voulu. Je vais distordre le temps un moment, que l'on n'en perde pas trop à papoter. »
Il tapota sur un écran tactile esthétiquement fiché dans un mur, puis se dirigea vers un placard situé derrière une porte que le Piêmni-Garou n'avait même pas soupçonnée. Du réduit, il tira un tableau aux dimensions assez impressionnantes qu'il installa.
« Bon, alors tout ce que tu connais en biologie, chimie, mathématiques et physique, tu l'oublies. C'est du pipi de chat ! La grande unification de l'ethnologie et de la chimie, tu l'oublies aussi, ça vaut quasiment rien. Tu ne vas rien comprendre ou presque à ce que je vais raconter, mais tu l'auras voulu. »
Il s'engagea alors dans un exposé qui sembla durer une bonne demi-journée au Piêmni-Garou, qui prenait tranquillement des notes et était émerveillé à chaque nouvelle découverte qu'il faisait. Trop tôt à son gout, une lumière rouge s'alluma et un signal sonore retentit. « Ah… on ne peut pas se permettre de continuer. L'ordinateur a fini de me trouver un chemin pour retrouver tes frères. Bien ! Je vais t'expliquer sommairement comment se passe la résurrection. Pour commencer, sache qu'ils ne sont pas complètement morts ; en réalité, la vasque que tu vois contient un capteur qui permet de maintenir en état leur activité cérébrale et leur fournit un rêve collectif. Tu vas entrer dans ce rêve et leur dire comment en sortir. »
Une nouvelle heure d'explications techniques s'ensuivit, le Piêmni-Garou demandant sans cesse force détails ; une fois que le vieil inconnu eut la certitude que son disciple avait bien intégré le tout, il lui indiqua quelles directions à prendre par les couloirs pour revenir ici depuis l'endroit où étaient les barbares.
« Mais pourquoi ne viens-tu pas ?
– Le chemin pour y aller m'est fortement déconseillé par mon médecin. Oui, c'est idiot, je sais, mais c'est comme ça…
– Ah, je comprends… ces couloirs doivent être humides, tu as des rhumatismes, quelque chose comme ça ?
– Des rhumatismes ? Tu plaisantes ? Ça fait longtemps qu'on sait soigner ça ! Mais là n'est pas le problème ! Tu ne t'imagines tout de même pas que tu vas passer par les souterrains pour les rejoindre ? Pour le retour, si tu ne te trompes pas en les guidant — d'ailleurs je vais te donner un plan à leur montrer —, vous devriez déjà prendre plusieurs jours et… Bon, tu sais ce que c'est qu'une diode ? Avec vos technologies tellement primitives, je ne sais jamais trop où vous en êtes. Bon, et bien, ces couloirs sont un peu comme une diode : il est presque impossible de passer dans l'autre sens, tu ne peux que les faire sortir de là. Pour les rejoindre, entre simplement dans la vasque. Et plus vite que ça, on n'a pas tout notre temps ! »
Le Piêmni-Garou était effaré par le débit du vieil homme. Il acquiesçait de la tête à tout ce qu'il disait, jusqu'à cette histoire de vasque. Entrer là-dedans ? Mais il déraille ?
« Et je sais interpréter les pensées superficielles, je t'ai déjà dit ! Non, je ne déraille pas. C'est trop compliqué à expliquer ; mais avec ce que je t'ai dit tout à l'heure, tu devrais pouvoir finir par comprendre tout seul. »
Coupant court à la conversation, il se retourna et tourna une molette sur le bord de la vasque de télévision, ce qui eut pour effet d'en transformer l'intérieur, rendant comme liquide le contenu. Il fit signe au Piêmni-Garou d'entrer dedans sans crainte, après lui avoir remis une carte. « Elle n'indique pas les pièges, par contre. Ils se déplacent, des fois, ajouta-t-il au moment où l'autre traversait la surface du liquide. Ah ! Et les autres n'ont pas besoin de savoir que ce n'est pas de la magie ! »

Au même moment, les barbares virent l'air devant eux, derrière le mécanisme avec les lames, se brouiller comme sous l'action de la chaleur et virent le Piêmni-Garou apparaitre comme par magie et tomber au sol en chancelant.[/i]

Ohhh Piêmni ! La voila notre issue !! On a qu'a faire passer Piêmni dans les lames ! Il est tellement rance qu'il va casser les lames à coup sûr ! hihi !...
Après un bref silence il se rendit compte que le Piêmni était vraiment là et de l'autre côté des haches !
HEY MAIS YA PIEMNI !!!!!

« Enfin bon, ce n'est pas grave, on va dire… L'essentiel, c'est que vous pouvez passer. »
Le Piêmni-Garou porta la main à sa tête : une douleur aigüe se faisait sentir à son front. Toutefois, cela ne semblait avoir en rien affecté sa mémoire, et il se souvenait de ce que le vieil inconnu lui avait dit. Une fois que les barbares eurent précautionneusement — en cassant toutes les lames — franchi le mécanisme, il s'adressa à eux : « Je suis tombé sur un homme étrange, très âgé, dans le zoo du donjon… Il a arrêté la vague de béton et… c'est idiot à dire, mais il est entré dedans et je l'y ai suivi. Nikro, il m'a dit de te parler d'une grotte, je n'ai pas tout compris, mais que tu verrais peut-être de qui il s'agissait. Quoi qu'il en soit… » Il leur raconta rapidement ce qui lui été arrivé et comment l'inconnu comptait les ramener dans le monde réel.
« Bref : il faut juste suivre le plan et éviter les pièges. Si j'ai bien compris… ils se déplacent, des fois. Ça me parait un peu trop facile, tout de même. Mais enfin… nous n'avons pas d'autres choix ! Si cela ne vous dérange pas, je préfère rester au milieu, dans la troupe : je suis un peu épuisé de ma course dans le donjon et la chute que je viens de faire m'a bien secoué. »